[Critique Film] – Gagarine

Affiche du film

Youri, 16 ans, sait que la cité dans laquelle il a vécu toute sa vie va être démolie. Père on ne sait où, mère mère trop occupée avec son nouveau compagnon, Youri va essayer de sauver la cité, puis y rester, envers et contre tout. Rêvant d’être cosmonaute, il va recréer la cité à l’image de son rêve. 

Même quand on ne le vit que de loin, la destruction des cités est quelque chose qu’on n’oublie pas. On se souvient de l’immense affichage de PNL sur leur cité d’enfance, vouée à être détruite : un dernier hommage rendu par des jeunes qui peuvent se payer un clip sur la Tour Eiffel mais n’ont jamais oublié le lieu qui les a vus grandir.

Alséni Bathily

Et c’est ça, in fine, le sujet de Gagarine : une communauté, des gens obligés de vivre ensemble. Ils se tolèrent, ils s’acceptent, et se célèbrent, aussi. Mais ils savent que la fin est proche, qu’il va falloir aller de l’avant et accepter d’être arraché à un lieu qu’ils ont, pour certains, toujours connus. La peur de l’inconnu d’un côté, l’insupportable insalubrité de l’immeuble de l’autre : les gens se déchirent, mais personne, au final, ne rechigne vraiment à partir. 

Et au milieu, Youri (comme Gagarine, joué par Alséni Bathily, incroyable) ne veut pas grandir ni aller de l’avant. Et qui pourrait lui en vouloir ? Il est seul, abandonné. Il se rêve cosmonaute donc,  dans ce non-temps d’une cité vide prête à être démolie, il se fantasme comme tel, un Thomas Pesquet qui n’a jamais les moyens d’arriver jusqu’à son rêve et va donc le faire venir à lui. 

Alséni Bathily et Lyna Khoudri

Il y a tellement de choses à démêler dans ce film sur une énième cité qui disparait. C’est l’histoire d’un enfant perdu qui poursuit son rêve, le fantasme, dans un film qui oscille en permanence sur le fil ténu de la réalité. Avec Gagarine, Fanny Liatard et Jérémy Trouilh croisent film de genre et film social. Ils osent montrer une histoire d’amour rarement vue au cinéma. Ils osent prendre une petite histoire, celle d’une cité détruite, et en faire autre chose, plutôt que de se cantonner au film social dans lequel le cinéma français, au demeurant, excelle. C’est une histoire de solitude, de rêves auxquels on se rattache quand la réalité devient trop dure à encaisser. 

Gagarine, c’est l’histoire d’un gamin qui pensait avoir une maison, qui pensait avoir des gens qui tenait à lui, et se retrouve seul, tout seul, sans parents ni amis. C’est un film dur, émouvant, terrible et inventif, mais surtout, c’est un film vivant, presque organique. 

SophieM lui attribue la note de :
9/10

En bref

Film à la mise en scène inventive et au propos profondément humain, Gagarine est le genre de film qui prouve bien que le cinéma français et ses nouvelles voix ont de bien belles choses à nous dire.

SophieM

27 ans. Militante féministe, libraire de métier. Je vis pour le fromage.

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