Si l’on connait Gilles Lellouche pour ses talents d’acteur depuis plusieurs années (Les Petits Mouchoirs, Jeux d’Enfants, La French, Fumer fait Tousser, BAC Nord…), il a su également rencontrer le succès en tant que réalisateur avec Le Grand Bain en 2018. Avec son nouveau projet, L’Amour Ouf, le réalisateur débarque en cette fin d’année avec un casting 5 étoiles et un des plus gros budgets de l’année pour le cinéma français (35,7 millions d’euros).
« Dans les années 1980, dans le Nord de la France, deux adolescents, Clotaire et Jackie, tombent éperdument amoureux et vivent une passion dévorante, malgré des différences de condition sociales et d’aspirations personnelles. Jackie, récemment orpheline de sa mère et proche de son père, rêve d’émancipation, tandis que Clotaire, perdu dans les difficultés du monde ouvrier, plonge peu à peu dans la délinquance. Dans les années 1990, après avoir passé dix années en prison pour un crime qu’il n’a pas commis, Clotaire est toujours hanté par Jackie et tente désespérément de la revoir. Mais Jackie est désormais mariée, installée dans une nouvelle vie rangée, et semble avoir définitivement tourné le dos à leur passé. Mais en réalité, aucun des deux n’a oublié cet amour ouf qui les a consumés adolescents et qui pourrait bien ressurgir et bouleverser à nouveau leurs vies. »
Sacré morceau que ce scénario calqué sur l’évolution d’une romance pas si ordinaire de personnages que tout oppose sur le papier. Jackie est une jeune fille sans histoire issue d’une famille aimante, tandis que Clotaire représente un enfant en errance issu d’une famille ouvrière très nombreuse. Aidé à l’écriture par Audrey Diwan, Julien Lambroschini et Ahmed Hamidi, Gilles Lellouche adapte ici un roman de Neville Thompson dont l’intrigue se situe à Dublin.
J’aurais personnellement aimé davantage d’équilibre entre les deux parties du film, à savoir la partie Malik Frikah/Mallory Wanecque et celle avec François Civil/Adèle Exarchopoulos. J’ai trouvé la première partie un peu longue pour ce qu’il y avait à raconter. La rencontre entre les deux jeunes opposés aurait pu nous économiser une bonne vingtaine de minutes pour raconter la même histoire. Dans un second temps leurs versions adultes n’a pas eu vraiment l’occasion de briller, les personnages n’ayant finalement eu aucune espèce d’évolution dans le récit, alors que 10 années se sont écoulées. Ce point en particulier m’a fait tiquer et je n’ai pas su m’attacher à des personnages qui ne se sont aucunement remis en question en 10 ans. J’ai bien conscience que l’idée de L’Amour Ouf c’est de montrer des personnages issus de milieux défavorisés et leurs galères, mais pour le coup j’ai trouvé les personnages principaux et secondaires plutôt naïfs, ou même bêtes.
On remarquera, d’un point de vue mise en scène, l’expérience acquise par Gilles Lellouche en tant réalisateur de clips musicaux pour différents artistes au début de sa carrière (NTM, Pascal Obispo, MC Solaar…). Cette créativité visuelle d’une qualité rare se retrouve dans L’Amour Ouf tout au long du film, avec notamment certains passages dansés, ou même simplement par une utilisation maitrisée de sa bande originale.
Le gros point fort du film reste son casting. Si Benoit Poelvoorde n’a plus rien à prouver, on retrouve ici les acteurs du moment avec François Civil (toujours impeccable) et une Adèle Exarchopoulos (qui malheureusement reste dans ses acquis). C’est également le cas de Jean Pascal Zadi ou Raphaël Quenard qui proposent plus ou moins la même chose qu’à leur habitude. Alors oui c’est bien, mais c’est du déjà vu. Alain Chabat lui, étonne encore par la finesse de son interprétation d’un père protecteur mais un peu largué. Enfin, Karim Leklou et Anthony Bajon ne bénéficient pas d’un temps de présence assez important pour démontrer leurs capacités. Pour les versions jeunes de nos protagonistes, on a la chance de voir émerger le jeune Malik Frikah (ancien champion du monde jeune de breakdance) dans un rôle qui lui va comme un gant. Mallory Wanecque est désormais habituée des plateaux et des nominations pour ses rôles. Elle joue ici habilement une jeune Jacquie qui se découvre adolescente.
L’Amour Ouf est un des films français de cette fin d’année à ne pas manquer, et même s’il n’est pas parfait, il n’en reste pas moins ambitieux et généreux dans ses visuels et dans ses choix musicaux. On aimerait voir plus souvent Gilles Lellouche à la réalisation.
CaptainSmoke lui attribue la note de :
En bref
L’Amour Ouf est un film qui, s’il est très bien travaillé techniquement, manque de profondeur pour ses personnages qui semblent surtout clichés et naïfs.